Laurène - Photo du jour n° 16 :

Ce château, tout comme celui de Vitré, est situé sur les Marches de Bretagne. Quelqu'un sera-t-il assez gentil pour faire une petite recherche et nous expliquer de quoi il s'agit ? (parce que moi, j'ai point l'temps !)


Gomi - écrivain plus rapide que son ombre

Chouette, une question d'histoire !


D'abord, du contexte : Le système féodal, c'est très simple (hem hem). Un seigneur gère un territoire (le fief), il peut choisir de dire « Okay, toi, t'as l'air un peu plus fort que moi, tu pourrais me faire très mal, on va tenter de faire copain-copain », il peut alors prêter allégeance à cet autre seigneur, qui accepte (ou pas, ce dernier peut aussi avoir envie de lui mettre sur la tronche pour lui prouver qu'il est plus fort et lui piquer ses terres). Il est alors vassal, et le dominant est le suzerain. Le suzerain doit protection et subsistance à son vassal, et le vassal doit conseil, aide armée et je ne sais plus quoi (en plus des impôts). Un vassal peut aussi avoir ses propres vassaux à lui.


Le Royaume de France n'échappe pas à cette règle : le Roy de France a ses terres à lui, qu'on appelle le domaine royal (et au début ce n'est pas gros, et divisé entre les fils à chaque mort de roy, autant dire que ça s'écharpe joyeusement et régulièrement à cette époque), et il faut attendre les Capétiens pour que le domaine royal ne soit plus divisé à la mort d'un roy (ce qui n'empêche pas le cadet de chercher à tuer son aîné pour récupérer le gros lot). Le Roy de France a des vassaux, à l'allégeance plus ou moins fluctuante, et c'est l'ensemble domaine royal + fiefs des vassaux qui donne le Royaume de France. C'est un système qui crée pas mal de soucis, surtout lorsqu'un vassal devient plus puissant que son suzerain (coucou Aliénor).


Mais revenons à nos moutons : Une marche, c'est un fief ou un ensemble de fiefs en bordure d'un royaume ou d'un empire, géré par un vassal auquel le suzerain donne plus de moyens et d'autonomie en matière de défense et d'organisation militaire qu'à ses autres vassaux. Il sert à défendre la frontière du royaume et à encaisser dans la durée une attaque dans l'attente des renforts royaux (il a donc généralement des gros châteaux bien costauds, et des troupes pour les défendre). Les marches se transformeront en fin de moyen-âge en marquisats (la racine du mot est la même, d'ailleurs), même si le titre de marquis deviendra vite plus honorifique qu'autre chose, le système féodal ayant fait long feu.


Ici, la Marche de Bretagne servait à défendre le Royaume de France contre les Bretons, ces vils païens celtiques naturistes, adorateurs d'arbres et précurseurs dans la construction de gratte-ciels, vu qu'ils faisaient déjà des lotissements entiers de pierres dressées vers Dieu (alors que le PLU ne l'autorisait pas, c'étaient vraiment des barbares, il fallait donc absolument s'en protéger, tous au bûcher !).


On a un autre exemple en France, la province de la Marche (en gros la partie nord de l'ancien Limousin), qui servait de zone frontière tampon entre le domaine royal et le duché d'Aquitaine, le Comté du Poitou, c'est à dire toutes ces terres vassales du Royaume de France jusqu'à ce que sa Duchesse, mariée au Roy de France, se fasse tèj par son époux, et change d'allégeance en allant se jeter dans les bras de l'héritier d'un autre royaume d'outre-manche, qui avait déjà pas mal de terres en Normandie, Maine et Anjou (les erreurs politiques et conjugales, ça pardonnait beaucoup moins à cette époque que maintenant). Cet héritier en question, qui avait à l'origine prêté allégeance au Roy de France pour ses terres entre Loire et Manche, se demanda une fois Roy et marié pourquoi il devrait être vassal d'un péquenot qui avait 80 hectares de terres entre Orléans et Paris (et qui en plus avait fait pleurer sa femme), alors que son fief allait de Bayonne jusqu'à l'Écosse.


300 ans de conflits ayant été engendrés par deux roys s'étant envoyés leur vassale à la figure (et pas que), désormais on s'envoie la vaisselle à la figure lors des disputes de couples, on a fini par se rendre compte que ça coûtait quand même un peu moins cher.


Et bien des années plus tard, plus de deux siècles après que de vils républicains ont tranché une tête de droit divin, un homme politique remit ce terme en avant, en instaurant une marche à l'échelle d'un royaume. Le pays entier devint une frontière, donc source potentielle de conflits constants, ainsi fut créée la République en Marche.