La première semaine chez des têtes connues était une introduction au voyage. Mais au final, pas de tout repos ! Quand on ne s'est pas vus depuis des lustres, on a beaucoup de choses à se dire, et les nuits sont écourtées. Je compte maintenant sur des nuitées en camping pour reprendre un sommeil normal. Et pour ne pas perdre mon temps à démonter la tente au matin pour la remonter le soir-même, je décide de séjourner trois nuits au même endroit. Ce sera à Châtillon-en-Diois, village classé parmi les plus beaux de France. Pas que j'ai spécialement choisi ce camping, mais début avril, les campings ouverts sont encore rares !


Ce matin, je bénis l'inventeur du masque de sommeil ! Ce bout de tissu bien opaque qui ne laisse filtrer aucune lumière m'a assuré une douce et longue nuit ! J'ai eu à peine un peu froid, mais je travaillerai sur ce point la nuit prochaine.


J'enfourche Hardie et nous partons sur les routes. Le parcours est fait de nombreux allers-retours, qui nous permettent de découvrir un maximum de jolis coins en un minimum de kilomètres. Et ça commence tout de suite, avec le cirque d'Archiane (prononcer "ch"). Je n'ai pas de mot intelligible pour le décrire. C'est un mélange de "Woooaaah", de "Oooh...." et de silence. Parce qu'on se sent toutes petites face à ce cirque. Toutes ces falaises qui nous dominent et nous entourent, tandis que nous filons au fond du cul de sac...


J'en profite pour m'épancher ici sur un problème qui m'obsède. Je n'ai pas de mémoire.

Bon, déjà, problème de mémoire numéro 1 : je ne reconnais pas les visages. Je ne suis pas la seule, ça porte même un nom : la prosopagnosie. Je le vis assez bien, même si c'est souvent gênant, par exemple dans un camping, quand je salue trois fois une même personne ! Je fais court sur ce point, ce n'est pas là où je voulais en venir.

C'était plutôt au point 2 :

Je n'ai pas de mémoire concernant ce que je fais. Notamment... les vacances. J'ai déjà passé une pleine semaine à Recoubeau-Jansac avec des amis il y a une dizaine d'années. C'est à 10 km d'ici. En une semaine, j'ai dû en faire, des choses, avec les copains ! ... Aucun souvenir de ces activités. Strictement aucun. Mon homme me rappelle certaines choses, qui n'éveillent rien chez moi. Revoir les lieux n'éveille rien de plus.

Mais ce n'est pas tout ! Je suis repassée dans le coin une deuxième fois ! À vélo cette fois ! Je sais que j'ai fait le cirque d'Archiane à cette occasion (entre autres). Mais idem : revoir cet endroit pourtant fabuleux n'a rien réveillé en moi. Enfin si... je crois que j'ai reconnu l'endroit où on avait pique-niqué !!


J'aimerais avoir la mémoire des visages d'une Camille (Miq.), la mémoire historique d'un Jean-Paul ou d'un Gomi, la mémoire géographique d'un Christian ou d'un Jérémy (Dup.), la mémoire de ce que me racontent mes amis d'une Mathilde (Men.) ou d'une Laure (Stol.). Mais pas de bol, j'ai hérité de la mémoire d'un Gruyère. On est comme on est !


Je me suis quand même rendue compte avec le temps que le fait de prendre des photos m'aidait à me souvenir. C'est triste, mais sans photo, le moment n'existera pas. Alors je mitraille ! Et du coup, vous devez subir d'incessantes photos sur TravelMap, avec interro le 1er novembre... 😁


Je me suis aussi rendu compte ces dernières années que voyager seule m'aidait à retenir les coins où je suis passée. Le fait de devoir me pencher sur les cartes, choisir un parcours, le suivre, et essayer de le retracer le soir, m'aide énormément à me rappeler ces endroits traversés. Et bizarrement, maintenant j'arrive à reconnaître des carrefours déjà empruntés. Une vraie fierté !


Fin de la disgression. Je ne vous raconte pas tout ce que j'ai vu aujourd'hui, hein ? Vous avez les photos pour ça. Je reviens quand même sur deux points qui m'ont marquée.


En vélo, quand il fait beau et chaud, on dérange souvent les lézards, qu'on entend ou qu'on voit s'échapper de leur spot au soleil, de peur de se faire écraser. Aujourd'hui, j'ai eu la chance de voir ce qui est peut-être courant pour vous, mais pas pour moi : de gros gros lézards vert pomme. Même qu'au lieu d'être plats, ils sont en 3D, ces gros lézards ! Ils sont trop rapides pour que je réussisse à les prendre en photo, donc tapez "gros lézard vert" sur votre moteur de recherche préféré et vous verrez de quoi je parle.

Quand je déambulais à pieds dans le marais des Bouligons, je vois un gros lézard partir vers ma droite. Très gros, mais pas vert ! Et puis, fort long maintenant qu'on en parle... Ah, ok, c'était un serpent ! J'attendais tellement de revoir ce lézard vert que mon cœur n'a loupé aucun de ses battements !


Au contraire, mon cœur s'est carrément emballé dans le "tunnel sans nom", qui permet de rejoindre Boulc depuis Châtillon. 840 m de nuit (régulièrement éclairé). 840 m de montée, aussi. J'ai enfin compris pourquoi mon compteur proposait un mode éclairage, qui permet d'illuminer son écran. Ce qui m'a permis de voir du 8, du 9 et du 11% de côte. Eh bien vu comme j'avais la queue entre les jambes, je pense n'avoir jamais grimpé aussi vite une côte à ces pourcentages ! Heureusement qu'il y avait peu de voitures. Les deux qui nous ont doublées m'ont bien suffi. On entend d'abord un énorme grondement. Qui s'amplifie. Et s'amplifie encore. Oh punaise, c'est forcément un camion. Un convoi exceptionnel, c'est sûr. La route est limitée à 70 km/h, mais si on m'avait dit que l'engin était à 110, je l'aurais cru !! Sommes-nous assez visibles ? Le conducteur nous a-t-il vues ? Va-t-il suffisamment s'écarter ? Et s'il ne met pas son clignotant, la voiture suivante va-t-elle nous voir à temps pour s'écarter à son tour ? Et s'il y avait trois voitures de suite ? Aaaaah ! Mon p'tit cœur, au secours, bats moins vite ! VVVVRRRROOOOOOMMM ... Ok, c'est bon, c'était une voiture, et il n'y en avait qu'une seule. Je m'arrête pour vérifier qu'on est bien visibles, même si j'ai peu de doutes sur la question. Hardie a une énorme lumière rouge à l'arrière et son œil nyctalope à l'avant, sans compter les bandes réfléchissantes sur la sacoche arrière et les pédales. J'ai pour ma part un gilet jaune avec larges bandes réfléchissantes, et des fleurs réfléchissantes sur mon casque. Impossible de nous louper. Sauf si le conducteur est aveugle, mais dans ce cas il ne conduirait pas. Logique.